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Tous les citoyens doivent participer à la vie de la nation au même titre. En plus de constituer une trahison au devoir d'unité nationale, les préférences ou considérations ethniques compromettent gravement la paix, la stabilité et la cohésion nationales. On retrouve des logiques ethniques à tous les niveaux de la vie de la nation : dans le gouvernement, dans la fonction publique, dans la gestion des entreprises, à l'intérieur des formations politiques, dans les conversations. Ceci, quoi qu'on dise est un manquement collectif qui illustre bien le fait que la notion de « nation » avec ses implications reste encore à définir, ou du moins mérite d'être redéfinie. Le réflexe ethnique, l'identification à la tribu demeurent des traits dominants qui avec l'appauvrissement grandissant du pays, le manque de justice sociale, le jeu politique tendent à s'exacerber.
En son temps, l'équilibre régional a été conçu en quelque sorte comme un moyen de ne léser personne en contentant le plus grand nombre par addition arithmétique : bafia + sawa + fulbé + beti + basaa + bamiléké + manguissa + bamoun + bakweri ou fong, bakundu, bamenda, bafwor, banyangui, balum, makossi, etc. Cette politique a effectivement le mérite de globalement pouvoir contenter tout le monde. L'équilibre régional pour ma part doit être perçu comme une première approche en vue de consolider la cohésion de la nation. Cette pratique possède en effet ses effets pervers puisque ce système nous maintient dans une logique ethnique ou chaque ethnie pourra éventuellement reconnaître l'un de ses fils ou l'une de ses filles dans le gouvernement. Le gouvernement étant perçu non comme un moyen de servir le pays mais plutôt comme l'occasion de bénéficier de manière égoïste des avantages et des faveurs de la république. L'objectif d'un gouvernement n'étant pas d'amadouer chacun individuellement mais de travailler avec compétence, persévérance et patriotisme à régler les problèmes de la nation, il me semble que l'équilibre régional doit être dépassé.
Tout problème ayant des solutions, je pense qu'il existe effectivement des moyens d'aller au delà de ce système de flatterie nationale qui ne fait pas avancer le pays : que les serviteurs de la nation en fonction dans le gouvernement, à l'assemblée nationale, dans la fonction publique démontrent par leurs actions leur volonté de s'occuper exclusivement des affaires de la nation sans favoritisme – il est du devoir de l'exécutif de veiller à ce qu'il en soit ainsi – alors je suis certain que le besoin de rattachement à l'ethnie s'estompera progressivement. Si des signes concrets étaient donnés aux camerounais que le président de la république, les ministres, les gouverneurs, les maires, les préfets, les forces de l'ordre du Cameroun se dévouaient à la cause nationale, à la recherche du bien-être ou du mieux être des citoyens et rien qu'à cela, je suis certain que le réflexe ethnique se verrait très vite remplacé par un authentique sentiment patriotique. L'attachement négatif à l'ethnie peut aussi se comprendre comme la recherche d'une forme de sécurité lorsqu'on a perdu la foi en les institutions républicaines ou en l'aptitude de ceux qui nous gouvernent à mener à bien le projet de construction de la nation. Tous ceux et celles qui reçoivent de la nation un salaire bénéficient parfois d'avantages considérables pour s'occuper des affaires de la république doivent faire ce pour quoi ils sont en poste et ainsi justifier la confiance que la nation leur a accordée.
De même, l'honnêteté nous oblige à reconnaître que même les plus zélés et les plus dévoués des serviteurs de l'état – oui, cette race n'a pas totalement disparu malgré la conjoncture – subissent les pressions de la famille, du clan, de la tribu qui réclament des faveurs à tout prix. La tribu ne doit pas contribuer à tirer les vaillants et patriotes enfants du TriangleNational vers le bas. Lorsque, individuellement, collectivement nous nous rendons coupables de telles attitudes, nous devons avoir le courage de reconnaître que nous le faisons au détriment du Cameroun, c'est-à-dire les 17 millions que nous sommes aujourd'hui. Nous devrons chacun d'entre nous intégrer le fait que celui ou celle dont le nom s'apparente au nôtre est un serviteur de la nation entière. Chacun doit accepter d'être mis en face de ses responsabilités si la prospérité de notre pays est réellement la chose que nous recherchons tous. Directement, indirectement, nous façonnons tous au quotidien le visage du Cameroun. Nous sommes le Cameroun et le Cameroun c'est chacun d'entre nous. Nos pensées, nos paroles, nos actions, nos peurs, nos espoirs, si infimes soient-ils, ont à la longue un impact sur l'ensemble de la communauté. Nous avons tous une part de responsabilité dans le destin de notre pays, cela nous devrons désormais l'intégrer.
L'équilibre régional donc n'est en rien une garantie d'équité sociale. En lui-même il n'est ni productif ni dynamique. Il consiste en une politique qui cherche à ne fâcher personne. Le gouvernement qui aura des chances de vraiment se montrer efficace sera composé de camerounais et de camerounaises compétents, amoureux de leur pays et non de leur propre personne, respectueux des citoyens et qui dans la gestion de l'état privilégierons exclusivement l'intérêt national, jamais les régionalismes avec pour cela le soutien total de l'exécutif, c'est-à-dire du président de la république. Je n'ai pas la prétention d'affirmer que cette démarche sera aisée, loin de là. En vérité elle demandera sacrifice et abnégation de la part des serviteurs de l'état. Cependant, mon avis est qu'elle demeure le passage obligé pour la mise en chantier d'un Cameroun conquérant. Lorsque les Camerounais ne se soucieront plus de connaître l'origine ethnique de leurs représentants, lorsque leurs représentants ne seront plus nommés sur la base de leur origine ethnique, lorsque ces représentants eux-mêmes ne se focaliseront pas sur leur origine ethnique, je pense que nous serons en droit de considérer ce cap comme une victoire pour le Cameroun. Mais ne rêvons pas, cela ne nous tombera pas du ciel. Pour qu'on y parvienne, il faudra nécessairement que l'exécutif joue pleinement son rôle et investisse toutes les ressources de sa volonté et de sa personnalité. Dans une république, il revient au président de la république de veiller à ce qu'il en soit ainsi. Cela fait partie intégrante de son rôle, de sa fonction, de sa mission. La république dans le cas présent étant le Cameroun, cette tâche revient donc au citoyen qui exerce la fonction de président de la république du Cameroun.
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